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Introspection comportementale : faire passer la conception des services à un niveau supérieur (DDN2-A22)

Description

Cet article porte sur l'introspection comportementale et sur la manière d'utiliser cette approche pour améliorer les politiques et de la conception des services.

Publié : 30 août 2023
Type : Article
Contributeur : Asma Hassan


Une personne se tient debout, les mains sur les hanches, et semble se demander quelle porte ouvrir parmi les sept portes aux couleurs vives qui se trouvent devant elle.

Introspection comportementale : Faire passer la conception des services à un niveau supérieur

Qu'il s'agisse de choisir un plat au restaurant ou d'acheter une nouvelle paire de chaussures, nous faisons des choix tous les jours. Il n'est pas surprenant que nos choix soient souvent influencés par des facteurs extérieurs dont nous n'avons pas forcément conscience. Décortiquons certains de ces facteurs et examinons comment une meilleure compréhension de ceux-ci peut conduire à une élaboration plus efficace des politiques et à une meilleure conception des services. Pour ce faire, nous appliquerons l'approche de l'introspection comportementale.

Avant de plonger dans le vif du sujet, il convient d'explorer quelques principes de base.

Quelle est l'approche de l'introspection comportementale?

L'approche de l'introspection comportementale intègre des principes issus de la psychologie, des sciences cognitives et des sciences sociales dans le processus d'élaboration des politiques. Elle s'appuie sur des connaissances fondées sur des données probantes concernant le comportement humain et les facteurs qui influencent la prise de décision. En sachant pourquoi les personnes font ce qu'elles font, il est plus facile de concevoir de nouveaux services et de nouvelles politiques ou d'adapter les politiques et services existants. En principe, cela se traduit par des interventions qui favorisent un changement de comportement positif du public.

Cela dit, il n'est pas toujours facile de comprendre les raisons qui sous-tendent nos décisions. En tant qu'êtres humains, nous disposons de ressources cognitives limitées. Cela signifie que nous nous appuyons souvent sur des biais et des raccourcis mentaux lorsque nous prenons des décisions. Ces biais, selon la recherche en science du comportement, peuvent influencer nos choix et nous empêcher de prendre les décisions les plus rationnelles ou les plus objectives. Voici quelques exemples de ces biais :

  • Surinformation : Nous sommes submergé·es par un excès d'informations lorsque nous essayons de prendre une décision.
  • Biais du présent : Nous optons pour une petite récompense immédiate plutôt que pour une récompense future plus importante.
  • Aversion à la perte : Nous préférons éviter les pertes plutôt que de réaliser des gains équivalents.
  • Effet de cadrage : Nos perceptions et nos choix sont influencés par le contenu et la formulation d'un message. Nous sommes facilement influencé·es par la manière dont les informations nous sont présentées, même si les faits sous-jacents sont les mêmes.

Examinons l'un de ces biais de façon concrète. En 2019, le ministère des Services à l'enfance et des Services sociaux et communautaires du gouvernement de l'Ontario a collaboré avec l'Unité de l'application des sciences du comportement en vue d'accroître l'utilisation de MesPrestations, un outil provincial de service social en ligne. La recherche exploratoire a révélé que la surinformation était l'un des facteurs qui empêchaient les utilisateurs et utilisatrices de s'inscrire au service.

Les biais cognitifs tels que la surinformation peuvent rendre la conception de services complexe. Les décideurs et décideuses politiques et les concepteurs et conceptrices de services ne peuvent pas supposer que les gens interagiront avec un service de la manière prévue. Ils et elles doivent prendre en compte les facteurs susceptibles d'influencer les personnes, tels que les biais, puis concevoir et tester le service en conséquence.

Voilà où l'introspection comportementale peut se révéler utile.

Politique et introspection comportementale

Une main place le dernier cube d'un casse-tête en bois afin de terminer l'image d'une loupe qui montre le cerveau d'une personne.

Les politiques fondées sur le comportement s'appuient sur l'expérimentation et la compréhension des facteurs qui guident le comportement humain. Cette approche peut consister à tester des initiatives à plus petite échelle afin d'en évaluer les résultats avant de les mettre en œuvre à plus grande échelle.

Dans l'exemple précédent, le ministère des Services à l'enfance et des Services sociaux et communautaires et l'Unité de l'application des sciences du comportement ont adapté leur stratégie de sensibilisation et testé de nouveaux courriels et messages textes auprès d'un échantillon de 4 000 client·es. Ces communications révisées ont permis aux utilisateurs et utilisatrices de s'inscrire plus facilement à MesPrestations. Elles contenaient des liens d'inscription directs, mettaient l'accent sur les avantages du service et fournissaient des rappels en temps opportun. Ces communications révisées ont toutes reçu des résultats positifs. Le Ministère a même rapporté qu'une version des nouveaux courriels avait permis d'au moins quadrupler le nombre d'inscriptions au service en ligne MesPrestations.

Comme vous pouvez l'imaginer, il existe de nombreuses façons d'exploiter l'introspection comportementale. Les interventions peuvent être aussi mineures qu'une mise à jour des messages ou, le cas échéant, aussi importantes que le lancement d'un nouveau programme. Tel a été le cas en 2011, lorsque le ministère des Affaires, de l'Innovation et des Compétences a lancé le programme Midata en collaboration avec l'équipe britannique d'introspection comportementale. Cette initiative a permis aux consommateurs et consommatrices d'accéder à leurs propres données de consommation liées à l'énergie, au téléphone cellulaire et aux cartes de crédit. En simplifiant le processus d'accès aux données, les consommateurs et consommatrices ont pu comparer plus facilement les offres et choisir celles qui répondaient le mieux à leurs besoins.

Application de l'approche de l'introspection comportementale

Maintenant que nous connaissons les principes de base de l'approche de l'introspection comportementale, examinons comment celle-ci peut être appliquée. Il existe des outils permettant de tirer parti des biais existants ou de réduire leur incidence négative. Voici quelques-uns de ces outils :

  • simplification : compréhension et exécution des tâches simplifiée;
  • normes sociales : compréhension commune de ce qui constitue un comportement approprié au sein d'une société;
  • cadrage : façon dont un choix est présenté aux décideurs et décideuses;
  • rappel : rappel explicite de l'action requise.

Dans le cas du ministère des Services à l'enfance et des Services sociaux et communautaires, la simplification a permis de remédier à la surinformation, de faciliter l'assimilation du contenu et de clarifier l'appel à l'action.

Détails de l'approche « EAST »
Approche « EAST »

Simplifier

Faire en sorte que les gens puissent aisément entreprendre des actions en éliminant ou en réduisant les efforts, les étapes et les choix, ce qui simplifie le processus.

  • Simplifier la communication et orienter les gens vers des actions précises
  • Réduire les inconvénients; trop d'efforts découragent la participation
  • Déconstruire les objectifs complexes en tâches plus simples et plus petites

Rendre les avantages attrayants

Présenter les avantages de manière à ce qu'ils paraissent plus intéressants. Votre offre doit donc se démarquer et sembler plus importante.

  • Personnalisation
  • Éveil de l'intérêt
  • Appel aux émotions
  • Optimisation des mesures incitatives
  • Rareté et optimisme

Tirer parti du facteur social

Recourir au pouvoir de l'influence sociale et au soutien des autres membres d'un groupe pour encourager les comportements souhaités et promouvoir un sentiment d'engagement pour toutes les personnes impliquées.

  • Biais de confirmation
  • Instinct grégaire et conformité
  • Biais d'engagement
  • Sélection du bon messager ou de la bonne messagère
  • Utilisation des réseaux sociaux existants

Faire en sorte que le moment soit opportun

Choisir les moments où les personnes sont les plus réceptives et présenter les avantages d'une manière qui les rend plus immédiats et plus intéressants.

  • Biais du présent
  • Moments de décision clés
  • Assistance lors de la planification
  • Commentaires

L'approche de l'introspection comportementale est de plus en plus utilisée et de nombreux cadres ont été élaborés pour aider les gouvernements et les organisations à tirer parti de cette méthodologie. Par exemple,  a été développée par l'équipe d'introspection comportementale, une unité du gouvernement britannique devenue depuis une entreprise mondiale à vocation sociale. Elle vise à encourager certains comportements en les rendant simples et attrayants, en tirant parti du facteur social et en trouvant le moment opportun de les adopter.

Avant de mettre en œuvre cette approche, vous devez définir le résultat souhaité et comprendre le contexte de la situation que vous vous apprêtez à gérer. Cela vous aidera à vous assurer que ce que vous concevez est pertinent et approprié. Les dernières étapes de ce processus consisteront à mettre en œuvre l'intervention, à évaluer son efficacité et à l'adapter si nécessaire.

Ce qu'il faut retenir

L'introspection comportementale peut être efficace, mais vous devez l'utiliser dans le respect de l'éthique. Gardez à l'esprit les deux enjeux clés suivants liés à l'application de ses principes :

  • manipulation : influence exercée sur le comportement des personnes à leur insu ou sans leur consentement;
  • paternalisme : décisions prises à la place des personnes sans tenir compte de leurs souhaits ou de leurs opinions, en supposant que c'est pour leur bien.

Si l'objectif d'améliorer les politiques est pertinent, il convient d'examiner attentivement les méthodes utilisées pour y parvenir. Les organismes en matière de politiques doivent veiller à respecter l'autonomie, la vie privée et le consentement des personnes tout au long du processus. Ce faisant, nous pouvons trouver un équilibre entre l'application de l'approche de l'introspection comportementale et le traitement éthique des personnes impliquées dans les interventions. Voici quelques conseils pour vous aider à développer et à mettre en œuvre des interventions comportementales éthiques :

  • Veillez à définir les problèmes éthiques potentiels dès le départ;
  • Faites appel à des expert·es au sein de votre ministère ou du gouvernement fédéral;
  • Veillez à ce que les interventions comportementales puissent être défendues auprès du public;
  • Recueillez des données de manière éthique en obtenant un consentement éclairé, en faisant preuve de transparence sur l'objectif des données recueillies et en utilisant celles-ci à des fins légitimes et légales, dans le respect de la vie privée;
  • Veillez à obtenir le consentement lorsque cela est nécessaire;
  • Prenez des mesures visant à garantir la transparence.

Prochaines étapes

L'introspection comportementale peut être un outil puissant pour une fonction publique centrée sur l'utilisateur et l'utilisatrice, et une communication efficace. Appliquée de manière responsable, l'approche de l'introspection comportementale peut aider à combler les écarts entre les besoins du public et les services offerts par le gouvernement.

Vous souhaitez en savoir plus sur l'introspection comportementale? Entamez une conversation sur l'introspection comportementale avec votre équipe en posant les questions suivantes :

  • Quelles hypothèses formulons-nous sur la réaction attendue du public à une politique, à un projet ou à une initiative?
  • Sur quels éléments ces hypothèses sont-elles fondées?
  • Comment pouvons-nous évaluer la véracité de nos hypothèses et les adapter si nécessaire?

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