Transcription
Transcription : Série Le gouvernement de l'avenir : Collaborer avec le public
[Logo de l'EFPC apparaît à l'écran, accompagné d'un texte indiquant « Webdiffusion »].
[L'écran passe à Mélanie Copeland dans un panneau de clavardage vidéo.]
Mélanie Copeland : Bonjour tout le monde. Je m'appelle Mélanie Copeland et je suis gestionnaire du Centre d'accélération de la transformation à Emploi et Développement social Canada. Au nom de l'École, je souhaite la bienvenue à toutes les participantes et tous les participants à l'activité d'aujourd'hui. J'ai le plaisir de présenter la séance d'aujourd'hui, intitulé « Collaborer avec le public », qui est la deuxième séance de la mini-série sur la collaboration dans le cadre de la série intitulée « Le gouvernement de l'avenir ». Cette série est le fruit d'une collaboration entre l'École de la fonction publique du Canada et l'Association canadienne des programmes en administration publique. Elle regroupe des universitaires et des praticiennes et des praticiens afin de leur donner l'occasion de discuter des dernières recherches universitaires dans le domaine de l'administration publique, ce qui nous permet d'adopter des stratégies et des pratiques utiles pour relever les défis d'aujourd'hui. Cette activité portera sur certains des facteurs et des défis à prendre en compte pour collaborer efficacement avec le public. Les conférencières et les conférenciers présenteront leur point de vue sur la mobilisation du public pour aborder les problèmes connus, suggérer des solutions et améliorer l'administration publique. Les participantes et les participants en apprendront davantage sur les pratiques les plus récentes en matière de collaboration dans un contexte gouvernemental, sur le moment de les utiliser et sur les stratégies visant à promouvoir la collaboration inclusive.
Avant d'aller plus loin, je tiens à signaler que je vous parle aujourd'hui à partir du territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anichinabé. Je souhaite exprimer ma gratitude aux générations passées et présentes d'Algonquins, qui sont les gardiennes et les gardiens originaux de l'espace que j'occupe. Je suis très reconnaissant d'être ici.
Nous avons prévu une excellente discussion pour vous et nous voulons vous offrir la meilleure expérience possible. Je passerai donc en revue certains points d'ordre administratif. Pour commencer, l'activité d'aujourd'hui se déroulera principalement en anglais. L'interprétation simultanée et le service de transcription en temps réel des communications (TTRC) sont à votre disposition, si vous en avez besoin et si vous voulez suivre dans la langue de votre choix. Vous pouvez utiliser ces fonctionnalités directement à partir de l'interface de la webdiffusion ou consulter le courriel de rappel qui vous a été envoyé par l'École. Nous répondrons aux questions tout au long de l'activité au moyen la plateforme de vidéoconférence Collaborate. Pour soumettre votre question, cliquez sur le bouton « Participer » dans le coin supérieur de droite de l'écran. Nous essaierons de répondre au plus grand nombre de questions possible aujourd'hui. Nous vous encourageons à participer en grand nombre et d'utiliser la langue de votre choix. Nous vous encourageons à vous déconnecter de votre RPV pour profiter pleinement de l'activité. Si vous avez des problèmes techniques, nous vous recommandons de cliquer à nouveau sur le lien à la webdiffusion qui vous a été fourni.
[Anna Kopec, Vince Hopkins et Jeannie Dempster apparaissent dans des panneaux de clavardage vidéo distincts].
J'aimerais donc vous présenter Anna Kopec, professeure adjointe en politique publique et en inégalités à l'Université Carleton. Sa recherche au niveau doctoral a porté sur les effets des politiques publiques sur l'action et la participation politiques des personnes en situation d'itinérance à Melbourne et à Toronto. Bienvenue! Nous accueillons Vince Hopkins de l'École supérieure de politique publique Johnson-Shoyama de l'Université de la Saskatchewan. Il a été fonctionnaire au sein des gouvernements fédéral et de la Colombie-Britannique. Il a également été chercheur invité à l'Université du Michigan en plus d'avoir reçu une bourse de doctorat du Groupe canadien d'étude des questions parlementaires. Bienvenue, Vince! Nous accueillons également Jeannie Dempster, directrice du laboratoire de l'innovation à Emploi et Développement social Canada. Il s'agit de la dernière étape d'une longue carrière au sein du gouvernement fédéral, qui l'a notamment conduit au Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada et au Bureau du Conseil privé. Bienvenue, Jeannie!
Commençons donc nos présentations, car nous sommes très enthousiastes. Commençons par vous, Anna. J'ai bien hâte d'entendre les thèmes et les conclusions de votre recherche.
Anna Kopec : Merci pour cette introduction, Mélanie.
Bonjour tout le monde. J'ai le plaisir de me retrouver ici aujourd'hui pour parler d'un sujet d'actualité important qui est très lié à mon travail. Comme Mélanie l'a mentionné, mes recherches portent sur la situation d'itinérance et la participation politique. Je me suis demandé comment les politiques auxquelles les gens ont accès influencent leur organisme politique, et chercher à comprendre de quelle façon ils collaborent avec le gouvernement pour faire changer les choses. Comment les expériences vécues relatives à la présentation d'une demande de logement ou d'aide sociale influencent-elles la façon dont les gens perçoivent le gouvernement et la façon dont ils participent? Cette recherche m'a donné un point de vue unique sur l'engagement des citoyennes et des citoyens du point de vue d'une population marginalisée et souvent écartée par la société canadienne. Comprendre où et comment les gens sont mobilisés, et aussi par nature où les gens ne le sont pas, nous permet de réfléchir aux raisons pour lesquelles les politiques ne changent pas et où certaines voix sont exclues de l'influence de ces changements.
J'ai mené plus de 100 entrevues auprès de personnes en situation d'itinérance, de fournisseurs de services et de décideurs dans la belle ville de Melbourne, en Australie, ainsi qu'à Toronto, et j'ai appris que les personnes en situation d'itinérance interagissent avec le gouvernement de différentes façons. Leurs interactions quotidiennes avec les services sont des formes de participation; il y a aussi différentes possibilités d'engagement au sein de différents lieux. Le problème qui se présente est alors de savoir où leur engagement est valorisé et où il ne l'est pas, ce qui a une incidence sur l'endroit où de telles occasions de mobilisation sont offertes. Bien que les individus se mobilisent de diverses façons pour apporter des changements, les occasions qui leur ont été données de s'engager auprès du gouvernement et des services dépendaient du contexte politique. J'ai constaté que la façon dont nous concevons les politiques influençait non seulement les personnes qui voulaient s'engager auprès du gouvernement, mais aussi l'endroit où elles le faisaient. Nos politiques créent des environnements qui valorisent certaines formes d'engagement plutôt que d'autres. Il y a donc des façons de dévaloriser l'engagement en rendant les politiques moins visibles, en réduisant leur accessibilité et leur inclusivité. Il s'agit d'un sujet que nous aborderons certainement plus tard avec Vince. Ces politiques envoient non seulement des messages sur qui est méritant dans notre société, mais elles créent aussi des espaces où une certaine participation est plus valorisée qu'une autre. L'engagement n'est donc pas simplement une loi, c'est un environnement que nous créons et qui interagit avec les politiques et les services. L'engagement peut influencer les politiques, mais peut subir leur influence à son tour.
La comparaison entre Melbourne et Toronto a été assez importante dans ma recherche. J'ai constaté qu'à Melbourne, il y avait plus d'engagement auprès des personnes qui avaient vécu l'itinérance dans l'élaboration des politiques, mais aussi dans les services. Et cela va au-delà de la consultation qui est souvent présentée comme une collaboration, mais qui est en fait plus superficielle et symbolique. Cette consultation au niveau de la surface était plus courante à Toronto. Les gens ont souvent parlé de l'importance de leur expérience vécue et de leur désir de s'engager de manière à apporter des changements non seulement pour eux, mais aussi pour leurs pairs et la société en général. Ils ont expliqué pourquoi les politiques n'ont pas les résultats escomptés et quelles modifications précises il faut apporter. C'est pourquoi, aujourd'hui, je vais vous faire part de certaines mesures que nous pouvons prendre pour favoriser un engagement plus inclusif de la part des personnes avec qui j'ai eu l'immense privilège de discuter. Ces personnes m'ont souvent parlé de leurs expériences à différents endroits. Souvent, elles avaient l'impression que leur expérience était sous-évaluée, qu'elles n'étaient que des figurantes et que leur message n'était pas vraiment entendu. Souvent, les personnes ont parlé de l'importance de l'engagement du gouvernement auprès de la population, mais d'un engagement plus continu et plus éclairé, où les gouvernements sont issus d'une compréhension qui ne place pas certaines expériences derrière d'autres. L'expertise vécue, après tout, est une forme d'expertise pertinente, dont il faut tenir compte dans les politiques.
J'aimerais insister sur le fait que la collaboration et la mobilisation vont au-delà de la consultation — il s'agit de processus continus et à long terme. Pour apporter des changements positifs aux politiques, nous devons partager l'espace politique avec d'autres, d'une manière réellement inclusive. Dans le même ordre d'idées, pour partager le pouvoir, il faut également renforcer les capacités au sein de la communauté. L'engagement est un projet à long terme, alors le renforcement de cette capacité devrait être un objectif qui va au-delà des ministères. Cela peut comprendre de multiples niveaux d'engagement, de ressources et de soutien pour les personnes concernées. Beaucoup de gens m'ont parlé de gestes symboliques et de l'illusion d'inclusion. L'engagement ne doit pas devenir une fin en soi. Réduire la diversité du public pour que leurs points de vue correspondent aux objectifs des ministères ou pour faciliter les choses est contraire à l'objectif de l'engagement. La mobilisation a presque toujours exclu délibérément certaines personnes. Il est donc nécessaire de veiller à ce que la mobilisation soit accessible. Il faut donc s'assurer de tenir compte de différents facteurs que nous pourrons peut-être analyser plus tard, notamment de l'emplacement et du format, mais aussi de l'indemnisation, de la garde d'enfants, du temps, de la capacité et des normes communautaires.
Pour favoriser la mobilisation, il faut aller au-delà de la façon structurée de faire les choses et créer des environnements où bon nombre des personnes peuvent être incluses de façon significative et appuyées tout au long du processus. Il ne s'agit pas seulement d'engagement, mais d'un engagement significatif. Cela signifie qu'il faut se demander pourquoi la mobilisation est nécessaire en premier lieu et pourquoi le public pourrait en bénéficier. Ensuite, il faut aller au-delà de la mobilisation, et rencontrer les participants à nouveau pour les informer de la façon dont les résultats de la mobilisation ont été utilisés et de poursuivre ces relations. e suis certaine que bon nombre d'entre vous peuvent penser à diverses mobilisations pour différentes stratégies et politiques qui n'ont peut-être pas été aussi fructueuses que vous l'auriez espéré. Ces échecs sont non seulement frustrants pour vous, mais aussi pour le grand public.
Apporter des changements significatifs à la mobilisation du public ne consiste pas toujours à recommencer à zéro. Les changements peuvent commencer à tout moment au moyen de simples modifications apportées à la façon dont on interagit et en s'appuyant sur des expériences et des relations antérieures. Dans le cadre de ces relations, il est essentiel de définir clairement la manière dont la mobilisation sera utilisée. Autrement, comme les personnes avec qui j'ai parlé l'ont souvent souligné, les participantes et les participants se demandent pourquoi ils se sont engagés et pourquoi cet engagement était important, ce qui a des conséquences sur la relation qu'a le public avec le gouvernement, ainsi que sur d'autres formes d'engagement.
Je terminerai par un dernier point rapide : C'est tout à fait acceptable d'être mal à l'aise. En ce qui concerne le gouvernement, le milieu universitaire et le public, nous devons réfléchir et tenir compte des personnes que nous mobilisons et de celles que nous formons. Ce n'est qu'à ce moment-là que nous pourrons constater les déséquilibres de pouvoir et demander l'avis de différents intervenants. Cependant, si nous le faisons avec soin et si nous créons des environnements de collaboration, il y a de nombreuses conséquences positives qui découlent de la mobilisation. Comme le montrent mes recherches, une mobilisation significative peut donner lieu à des services, des politiques et des prestations améliorés qui profitent à la capacité d'agir et l'autonomie politique des citoyennes et des citoyens. Il s'agit d'une responsabilité importante qui doit être prise au sérieux.
Merci encore à Mélanie et à l'École de la fonction publique du Canada de m'avoir accueillie ici aujourd'hui. J'attends avec impatience la discussion avec Vince, Jeannie et vous tous.
Mélanie Copeland : Merci beaucoup, Anna. C'était vraiment, vraiment percutant et symbolique cette illusion de l'inclusion de laquelle vous avez parlé. Vous abordez des sujets familiers que sont la collaboration, le travail direct avec les utilisateurs et la conception pour les groupes marginalisés. Les fonctionnaires participants sont invités à prendre connaissance des Normes relatives au numérique du gouvernement du Canada pour adopter des comportements efficaces à l'ère numérique, mais aussi pour répondre aux attentes des citoyennes et des citoyens. Anna, merci beaucoup pour cette excellente présentation, j'attends avec impatience la période de discussion. J'ai déjà préparé mes questions à poser tantôt. Et maintenant, enchaînons avec la partie de Vince.
La parole est à vous, Vince.
Vince Hopkins : Merci beaucoup, Mélanie.
Bonjour tout le monde.
Je participe à la conférence d'aujourd'hui à partir de Saskatoon. Il s'agit du territoire du traité n° 6. Il s'agit également du territoire traditionnel des Métis. Plus tard cette année, je me joindrai à l'Université de la Colombie-Britannique, qui se trouve sur le territoire ancestral traditionnel non cédé de la nation Musqueam.
J'ai vécu à de nombreux endroits et, comme l'a dit Mélanie, j'ai travaillé pour le gouvernement fédéral à Gatineau , puis un certain temps pour le gouvernement de la Colombie-Britannique. Maintenant, j'habite dans les Prairies. Mais je veux aujourd'hui parler brièvement de mes recherches sur les programmes sociaux. Je tiens à faire valoir que, tout comme les programmes sociaux, les services publics sont un déterminant clé des résultats sociaux, et cela est particulièrement vrai pour les gens qui vivent en marge de la société, qui sont opprimés et qui ont été exclus du marché du travail. Dans ce contexte, j'aimerais parler un peu de la faible utilisation des services publics. Comment se fait-il que des personnes qui pourraient bénéficier de programmes gouvernementaux n'en font-elles pas la demande? C'est là-dessus que porte toute ma recherche. Il y a tellement d'exemples canadiens. Le Bon d'études canadien est assez connu au gouvernement fédéral. Il est versé à environ 40 % des enfants issus de familles à faible revenu. Le crédit d'impôt pour personnes handicapées est un autre exemple bien connu. Mais il y a d'autres exemples à l'extérieur du Canada. Aux États-Unis, près de la moitié des Américains admissibles demandent des prestations auprès du Programme d'aide de nutrition supplémentaire (ou le Supplemental Nutrition Assistance Program). Environ les deux cinquièmes des familles admissibles présentent une demande d'aide temporaire pour les familles dans le besoin par l'entremise du programme Temporary Assistance for Needy Families des États-Unis. Le faible taux d'utilisation est donc une caractéristique déterminante des programmes sociaux. J'aimerais faire trois brèves observations à ce sujet.
Tout d'abord, je tiens à faire valoir que l'administration publique coûte toujours cher et que les programmes répartissent généralement les coûts de l'administration publique entre les citoyennes et les citoyens et le gouvernement. lorsque le partage des coûts entre les citoyennes et les citoyens et le gouvernement est inégal, ce sont habituellement les citoyennes et des citoyens marginalisés qui paient plus que leur juste part. C'est donc dans ce contexte que je pense que la collaboration avec le public revêt toute son importance. Les efforts en ce sens nous aident à comprendre l'expérience du client (j'entends souvent dire que le gouvernement cherche à « comprendre l'expérience du client »), mais ils nous permettent également de définir la répartition des coûts, qui peut nous aider à cibler nos ressources gouvernementales internes pour augmenter le taux d'utilisation. Il existe une sorte d'énigme dans la littérature académique — pourquoi le taux d'utilisation est-il si faible? Le gouvernement consacre beaucoup d'argent et de temps à concevoir et à mettre en œuvre ces programmes, mais les gens ne les utilisent pas. En général, il y a trois raisons pour lesquelles le taux de participation est faible. Il pourrait s'agir d'un problème faible sensibilisation : les gens ne savent tout simplement pas que le programme existe. La motivation peut poser des difficultés sur le plan de la clarté : les citoyennes et les citoyens ne savent pas vraiment s'ils veulent utiliser le programme. Et troisièmement, l'utilisation est peut-être tout simplement faible, c'est-à-dire qu'il est compliqué de recevoir ce qui est prévu par le programme.
Le manque de sensibilisation semble donc très courant. Nous envoyons du courrier électronique à des personnes qui ne l'ouvrent pas ou des brochures à des personnes qui les jettent au recyclage. La question de la motivation, à savoir si les citoyennes et les citoyens veulent quelque chose, n'est pas très simple elle non plus. La terminologie que nous utilisons peut constituer un obstacle important. De nombreuses recherches menées aux États-Unis montrent que la stigmatisation est une caractéristique commune des programmes sociaux et que la stigmatisation réduit l'intérêt des personnes à s'inscrire à des programmes tels que les bons d'alimentation (inaudible) ou les subventions locatives. Mais même si les gens savent qu'un programme existe et qu'ils se disent « Oui, inscrivez-moi, je veux utiliser le programme », le taux peut demeurer faible. Est-il possible de présenter une demande réellement fructueuse? Il faut peut-être naviguer vers un formulaire en ligne, rassembler tous les documents, remplir un long formulaire de demande, voire de passer un entretien avant même de pouvoir utiliser un programme. En cas d'erreur, les demandeurs peuvent être appelés à répéter le processus à partir de zéro.
Les taux relatifs aux programmes comportent donc trois composantes : la connaissance, la motivation et l'utilisation. Je dirige une unité de recherche intitulée le Behavioural Public Policy Lab, qui est composée d'une équipe de six personnes : c'est-à-dire de deux chercheurs à temps plein, de doctorants formidables et de moi-même. Nous étudions les trois composantes que sont la sensibilisation, la motivation et l'utilisation. Nous menons des entrevues et des expériences, nous essayons de sensibiliser les Canadiennes et les Canadiens et des non-Canadiennes et des non-Canadiens, de les motiver et de simplifier leur utilisation des services publics pour les aider à y accéder, du moins au Canada. La plupart de mes travaux concernent les programmes d'emploi. Il s'agit de personnes qui ont perdu leur emploi, qui ont un emploi précaire et qui pourraient bénéficier de subventions salariales, d'une formation professionnelle, de conseils en matière d'emploi, mais qui n'utilisent pas les programmes pertinents. Par exemple, l'année dernière, j'ai mené des entretiens à Vancouver, dans le quartier Est du centre-ville, et plusieurs entretiens virtuels dans toute la province, afin de comprendre pourquoi les jeunes à risque utilisent ce type de services d'aide à l'emploi. Les entretiens sont très intéressants, car nous avons beaucoup entendu parler du manque de sensibilisation des jeunes. Souvent, ils ne savent tout simplement pas qu'un programme est disponible ou ils ont une perception erronée de son objectif. Ils pensent que le programme ne les concerne pas, alors que le programme cible exactement les gens dans leur situation. À l'automne, nous avons rassemblé ces entretiens dans le cadre d'un atelier de conception conjointe. J'ai donc travaillé avec des partenaires communautaires sur le terrain qui utilisent ces nouveaux outils numériques qui sont très utiles pour améliorer la sensibilisation. Nous essayons d'intégrer des apprentissages de politiques, de voir ce qui fonctionne dans les activités des partenaires communautaires, et nous avons invité des décideurs politiques de haut niveau de l'ensemble de la province à se joindre à cette conversation, et ils nous ont éclairés sur l'utilisation des programmes. Pourquoi le processus de demande est-il parfois si compliqué? Pourquoi le processus d'aiguillage vers les services et entre différents services est-il si délicat? Nous travaillons présentement à la tenue d'entretiens, de l'atelier de conception conjointe et de consultations pour tenter de résoudre le problème. Je travaille avec quelques provinces et certaines organisations fédérales. J'aime bien travailler avec le gouvernement fédéral pour augmenter l'utilisation des services d'emplois. Je m'explique : quand je parle d'améliorer l'utilisation, cela veut dire que nous réalisons des essais contrôlés randomisés à grande échelle pour mettre à l'essai les interventions potentielles et voir ce qui fonctionne, aider les gens à accéder à la formation et aux opportunités afin qu'ils puissent s'épanouir dans leur carrière.
Au début de ma présentation, j'ai dit que l'administration publique coûte cher et que les programmes répartissent généralement les coûts entre les citoyennes et les citoyens et le gouvernement. Ce modèle de partage des coûts est souvent inégal. Les citoyennes et les citoyens, et en particulier ceux qui sont marginalisés, finissent par payer plus cher qu'ils ne le devraient pour administrer les programmes gouvernementaux. Cela peut prendre la forme d'une collecte de documents, d'une mise en attente, d'une file d'attente. Mais lorsque nous collaborons avec le public, lorsque nous faisons des choses comme des entretiens, des ateliers de conception conjointe et que nous faisons participer les décideurs et les partenaires communautaires au processus décisionnel, nous pouvons en quelque sorte nous assurer que ces coûts sont répartis de façon un peu plus équitable. Et je pense que cela permet également de faire augmenter la qualité des services publics. J'estime que les méthodes mixtes sont particulièrement efficaces. Nous pouvons utiliser des entretiens pour comprendre le problème, mais nous pouvons utiliser la conception conjointe pour élaborer des solutions. Toutefois, nous ne nous arrêtons pas à la conception et nous ne nous arrêtons surtout pas à la recherche et à la conception. Nous utilisons des expériences sur le terrain pour découvrir et recueillir des données sur ce qui fonctionne vraiment. Ce n'est pas facile, n'est-ce pas? Il est difficile de réunir des citoyennes et des citoyens et les décideurs dans les salles de décision, de travailler en collaboration avec différents ordres de gouvernement et de faire participer d'autres intervenants. C'est compliqué, mais si quelqu'un peut le faire, c'est bien la fonction publique fédérale. Par contre, quand nous y parvenons, nous pouvons réduire le coût global pour les citoyennes et les citoyens et, selon moi, à améliorer l'équité de nos politiques publiques.
Merci beaucoup.
Mélanie Copeland : Merci beaucoup, Vince, pour cette merveilleuse présentation. Il ne suffit pas de promouvoir les prestations, comme vous le dites. Il faut également travailler pour aider les personnes qui veulent s'en servir en créant une expérience de service transparente pour les citoyennes et les citoyens afin de réduire les obstacles qu'ils doivent franchir. Je me souviens qu'au début de la pandémie, TikTok était en plein essor et que de merveilleuses praticiennes et de merveilleux praticiens de la santé publique ont trouvé un moyen d'entrer en contact avec les jeunes et d'y diffuser de bons conseils et de bonnes astuces. Il existe de nombreux canaux très amusants que nous pouvons utiliser. J'ai bien hâte de connaître les solutions numériques créatives que vous avez observées. Merci beaucoup, Vince.
Et maintenant, je cède la parole à Jeannie.
Jeannie Dempster :Merci beaucoup, Mélanie.
Et merci encore aussi à Anna et Vince. Moi, je suis Jeannie Dempster, la directrice du Lab d'innovation. Je suis très, très heureuse d'être ici.
Et je pense que c'est tellement logique que ma présentation suive celle d'Anna et de Vince qui ont présenté une toile de fond et un contexte importants des types de recherche et des types de travail qui s'effectuent maintenant, et qui se produisent dans le milieu universitaire.
[Une diapositive apparaît avec le texte « Vue d'ensemble du Laboratoire de l'innovation d'ESDC – Concevoir des solutions avec les Canadiennes et les Canadiens, pour le Canada »]
Je suis donc consciente du fait qu'il pourrait y avoir aujourd'hui un public assez large de l'ensemble du gouvernement.
[Une diapositive apparaît avec le texte « Laboratoire d'innovation d'ESDC en un coup d'œil – Concevoir des solutions avec les Canadiens, pour le Canada ».]
Je souhaite rappeler à tout le monde que je travaille à Emploi et Développement social Canada, ou ESDC. Je vais m'inspirer un peu, je l'espère, des sujets abordés par Vince et Anna, car leurs domaines de recherche s'alignent vraiment bien avec le travail qu'effectue notre ministère. Nous nous occupons des politiques et des programmes socioéconomiques comme l'assurance-emploi et cette responsabilité de l'itinérance, dont parlait Anna. C'est ainsi que le laboratoire de l'innovation d'EDSC a été créé. D'ailleurs, en mai prochain, le laboratoire célébrera sa huitième année d'existence. Il a énormément évolué au fil du temps. Cependant, au cœur du projet, il y a toujours eu l'idée de la recherche centrée sur la personne. Il s'agit de la raison pour laquelle il est si important pour nous d'intégrer cela dans nos capacités au sein du gouvernement, dans la recherche, dans un domaine particulier qui éclaire nos politiques et nos programmes existants; c'est exactement pour les nombreuses raisons qu'Anna et Vince ont si éloquemment décrit aujourd'hui.
En pratique, le laboratoire travaillera avec ses partenaires au sein du gouvernement, mais notre objectif final consiste à toujours améliorer les expériences vécues et le bien-être des clients d'EDSC. En outre, nombre d'entre eux se trouvent dans des situations précaires lorsqu'ils se tournent à nous. Le laboratoire et les projets sur lesquels nous avons travaillé avec nos collègues d'ESDC ont donc couvert un grand nombre de ces domaines. Il s'agissait d'utiliser des méthodes de recherche qualitative pour mieux atteindre ces populations. C'est quelque chose de relativement nouveau pour le gouvernement, car habituellement nous nous y reportons ou utilisons d'autres techniques et outils, d'autres méthodologies, une forte utilisation des statistiques et des méthodologies quantitatives. Nous menons également des consultations, bien sûr. Je suis issue du milieu des politiques. La consultation a toujours été un élément essentiel de l'élaboration des politiques, ce n'est pas du tout nouveau. Il s'agit de savoir qui consulter et comment les consulter. Les projets réalisés au laboratoire visent à introduire des approches différentes. À l'instar de certains projets de recherche et autres projets réalisés par Anna et Vince, nous avons travaillé et réalisé certains de ces projets à l'interne pour le gouvernement. Nous travaillons donc actuellement avec certains de nos collègues sur le Bon d'études canadien, encore une fois, pour améliorer ces problèmes de participation et d'accès. Nous avons travaillé sur des projets avec des personnes âgées à faibles revenus. Notamment, nous avons discuté avec eux directement pour obtenir des renseignements vraiment incroyables et précieux.
Je voudrais revenir sur un point que Vince a mentionné, je crois, soit les méthodes mixtes. Qu'est-ce que cela signifie? En pratique, dans le cadre de ce projet sur les aînés à faible revenu, nous avions des ensembles de données et des listes que nos collègues du ministère responsables des programmes nous ont communiquées. Nous avons donc communiqué avec eux, nous avons établi des liens et nous avons mis à l'essai, au moyen d'observations comportementales, des essais contrôlés randomisés à l'aide d'observations comportementales. Qu'est-ce que cela signifie? Ce sont des gens du laboratoire qui viennent du milieu universitaire, qui ont une formation et des antécédents en psychologie et en psychologie sociale et qui ont utilisé des techniques comme les essais contrôlés randomisés qui sont depuis longtemps utilisés dans le milieu universitaire, en sociologie. Ces méthodes ne sont pas du tout nouvelles; elles sont simplement plus récentes pour les fonctionnaires du gouvernement. J'ai donc tendu la main, mais les résultats ont été décevants. Donc, quand on parle de méthodes mixtes, on a identifié un certain nombre de collègues de... Désolée, je me reprends — des collègues de participants potentiels et nous avons eu des entretiens individuels très approfondis avec eux. En nous fondant sur les résultats, j'ai procédé à la rédaction d'une nouvelle série de lettres pour mieux les atteindre, ce qui a permis d'améliorer considérablement les résultats. Alors voilà, cela représente un exemple de projet à méthodes mixtes.
Depuis que nous y avons recours, et depuis mon arrivée en poste, il y a eu beaucoup de conversations internes sur les risques qui se présentent. Existe-t-il des approches de ce type au sein du gouvernement?
[Une diapositive apparaît avec le texte :
« Collaborer avec le public »
« Points de discussion »
« 1) Pourquoi la recherche axée sur l'humain est-elle pertinente dans le contexte des politiques et des programmes d'EDSC
- Le mandat socioéconomique se prête bien aux méthodes qualitatives
- Elle est harmonisée aux pratiques de recherches académiques »
« 2) Quelles sont les choses dont il faut tenir compte?
- La formation des employés
- La réputation du gouvernement
- Les défis liés à l'éthique »
« 3) Quelles sont les mesures d'atténuation potentielles des risques/solutions?
- Formation obligatoire :
- Intervieweurs – partenariats, niveaux supérieurs
- L'adoption de l'Énoncé de politiques des trois conseils (EPTC); d'une Charte éthique
- Comités d'éthique
- Autre? ».]
Il y en a certainement. Il y a des considérations très importantes à prendre en compte lorsque les gens.... nous sommes aveuglés par l'enthousiasme. C'est incroyable, nous avons obtenu de meilleurs résultats, nous avons amélioré la prise en charge des prestations, nous atteignons les gens qui sont les plus difficiles à atteindre. Il y a des considérations absolument essentielles à prendre en compte, et je sais qu'Anna et Vince ont abordé quelques-unes d'entre elles. De notre point de vue, au sein du gouvernement, les employés embauchés nous arrivent avec de la formation et des titres de compétences connexes au laboratoire d'ESDC.
En ce qui concerne les chercheurs qualitatifs, ils ont une formation en sociologie et une formation quantitative, ainsi qu'une formation en psychologie, en psychologie sociale et en introspection comportementale. Il s'agit donc de constituer des équipes, de veiller à ce que les personnes soient formées, comme nous le faisons pour tous les autres secteurs d'activité. Et puis, ces identifications, en particulier à EDSC, et il y a peut-être d'autres ministères aussi, si vous avez affaire à des populations particulièrement vulnérables ou difficiles à atteindre, il y a tellement d'autres considérations dont vous devez garder en tête, et doit être conscient des risques potentiels pour la réputation du gouvernement. Ce que je veux dire par là, c'est que lorsque vous parlez aux gens sur le terrain et que vous représentez le gouvernement du Canada, il faut être conscient de leur situation et de leurs circonstances.
Je crois qu'il a été question de l'histoire avec les populations autochtones. Si vous cherchez à mieux rejoindre les gens de partout au Canada et à améliorer ces relations avec eux, il est important de comprendre l'histoire et de comprendre notamment que le mot « recherche » est un terme très à caractère odieux auprès cette population pour des raisons historiques... comment puis-je exprimer cette idée autrement — il y a eu par le passé des interactions entre le gouvernement et les populations autochtones dans cette région. Il faut donc en tenir compte et avoir un plan essentiel avant de sortir sur le terrain pour effectuer le travail. Il convient également de veiller à ne pas faire double emploi. Il existe de nombreux groupes au Canada, y compris les Autochtones ainsi que d'autres populations qui nous ont fait part de leurs commentaires. Nous avons entendu des représentantes et des représentants de nombreux secteurs du gouvernement, et il s'agit d'une question importante pour le gouvernement fédéral. Une demi-douzaine de représentantes et de représentantes de services gouvernementaux différents sont venus nous parler. Ça devient un peu accablant pour eux. C'est pourquoi nous devons vraiment faire preuve d'une meilleure coordination. Et même au sein de grands ministères, comme à EDSC, il faut coordonner ces efforts lorsque nous nous préparons à mener des consultations. Il faut vérifier et confirmer si d'autres équipes ont déjà travaillé sur un sujet, s'il existe déjà des données, qui parle ou a déjà parlé à un groupe particulier et si c'est possible de tendre la main à ce groupe de personnes avant que l'on vienne vers nous? Il faut vraiment faire le bilan avant d'organiser une consultation auprès de ces populations. Les considérations dont il faut tenir compte ne sont tout simplement pas les mêmes que dans le milieu universitaire. Je sais aussi que beaucoup de chercheurs adoptent une approche semblable. Il s'agit d'une chose qui entre dans la ligne de compte au gouvernement, malgré le nombre déjà élevé de sujets à prendre en compte.
En outre, les questions éthiques connexes que cela nous pose nous poussent à des solutions potentielles, à des choses que nous envisageons et que nous avons déjà amorcées au laboratoire et à EDSC, pour nous assurer que les gens ont cette formation. Nos employés font toujours équipe avec un partenaire lorsqu'ils procèdent aux entretiens. Il y a toujours un agent chevronné qui est généralement accompagné d'une autre personne, chargée de prendre des notes. Nous disposons d'un projet de charte éthique que nous avons élaboré il y a plus de quatre ans pour le laboratoire et qui reprend essentiellement l'EPTC 2 répandu dans le milieu universitaire pour ces méthodes, et nous l'avons adapté au milieu gouvernemental. Enfin, nous avons créé au sein d'ESDC ce que nous appelons Qualnet. Il s'agit d'un réseau, ou plutôt d'une communauté de pratique de chercheurs en sciences qualitatives au sein de notre ministère. Les membres tiennent des réunions régulières et, à la suite de la définition de certains problèmes qu'ils ont soulevés, nous avons créé une série de groupes de travail. Je suis ravie que le laboratoire dirige, parmi d'autres, un groupe de travail sur les défis éthiques et l'idée de créer un comité d'éthique ou un comité d'éthique de la recherche au sein de notre ministère. Ce modèle de gouvernance existe déjà dans d'autres ministères, comme Santé Canada. Les ministères scientifiques plus traditionnels en disposent, et je pense qu'il est temps que les ministères qui s'occupent d'enjeux plus sociaux et socioéconomiques se dotent de tels comités.
Je vais m'arrêter ici pour aujourd'hui. Je suis enthousiaste à l'idée de répondre à vos questions.
J'aimerais répondre à vos questions dans la langue de votre choix. Et merci encore à Melanie, Anna et Vince !
Mélanie Copeland : Merci beaucoup, Jeannie. J'ai vraiment aimé entendre parler des méthodes mixtes du laboratoire et de vos expériences de travail et d'entrevues directes avec les populations vulnérables et difficiles à atteindre Merci beaucoup d'avoir présenté vos expériences.
Maintenant, passons à la période de questions et réponses. Nous souhaitons rappeler aux participantes et aux participants qu'ils peuvent cliquer sur le bouton « Participer » pour soumettre leurs questions. J'en ai quelques-unes moi-même pour ouvrir la discussion.
Je pense que nous pourrions commencer à discuter de cette idée que ce ne sont pas toutes les prestations qui parviennent aux bonnes personnes. Anna, pourriez-vous nous parler un peu plus de vos observations ou de vos réflexions, et nous expliquer pourquoi le problème se présente? Et comment pourrions-nous combler l'écart pour ce qui est d'assurer l'intégration adéquate de ces citoyennes et de ces citoyens?
Anna Kopec : Merci pour cette question, Mélanie. Il s'agit d'un sujet très important duquel nous devrions toutes et tous parler.
C'est en grande partie lié à ce que j'ai appelé la visibilité des politiques, et à ce dont on a beaucoup parlé dans le milieu universitaire au sujet de la visibilité d'une politique, et parfois même en ce qui concerne les fonctionnaires, ainsi que les prestataires de services. Évidemment, dans mon cas, je m'intéresse particulièrement aux personnes en situation d'itinérance. Beaucoup de gens à qui j'ai parlé n'étaient pas au courant de certaines prestations, puis ils m'ont dit qu'un excellent travailleur de première ligne leur avait partagé toute cette information dont ils n'avaient jamais entendu parler, et cela a plusieurs répercussions. Non seulement l'information ne parvient pas aux gens qui en ont besoin, mais le personnel de première ligne doit assumer une immense charge administrative même si ces travailleurs sont déjà surchargés, comme nous le savons, en particulier dans le secteur venant en aide aux personnes en situation d'itinérance. Le personnel de première ligne doit donc faire le gros du travail et rassembler l'information. Dans le cas de l'itinérance, cet effort touche de nombreux domaines politiques et non qu'un seul. Ainsi, de nombreuses personnes comptent sur les travailleurs de première ligne pour faire leur propre travail et leurs propres recherches sur les services qui sont offerts et ceux qui ne le sont pas.
Donc, là où les politiques et les services étaient plus visibles, j'ai constaté que cela comprenait non seulement une meilleure prestation et une plus grande participation, mais aussi des politiques plus intégrées. Il existe donc un lien entre la visibilité d'une politique, la manière dont elle a été mise en œuvre et la façon dont elle est coordonnée avec d'autres domaines politiques. C'est dans ces espaces, principalement à Melbourne, qu'il y a également eu une consultation continue avec les personnes utilisant les services. Par conséquent, il y a une excellente boucle de rétroaction où une plus grande visibilité, une mise en œuvre plus accessible et une plus grande collaboration entre les secteurs de politique mènent à une plus grande utilisation de la collaboration avec les gens qui accèdent aux services, lesquels comprennent les comités et les groupes de défense des intérêts, ainsi que diverses possibilités de participation avec le gouvernement et de travail de conception conjointe par les pairs. Je pense donc que la participation doit inclure une plus grande mobilisation des populations cibles dans l'ensemble et à de nombreux points différents du cycle des politiques, dont Vince et Jeannie ont également parlé, non seulement à l'étape de l'élaboration ou de la conception des politiques, mais aussi lors de leur mise œuvre, et plus tard à l'étape de l'évaluation, laquelle devrait constituer un processus continu.
Mélanie Copeland : Merci beaucoup, Anna.
Et Vince, vous avez parlé de problèmes similaires en matière d'utilisation et de mobilisation, y compris le langage simple que nous utilisons pour communiquer avec les citoyennes et les citoyens, ou les méthodes que nous utilisons pour rejoindre certaines populations. Par exemple, il se peut que nous devions nous rendre en personne ou communiquer dans la langue choisie par la personne. Vous avez également parlé des services qui ne sont pas faciles à accéder. Des services qui présentent des difficultés. Suis-je toujours sur le site du gouvernement du Canada ou suis-je ailleurs? Quels seraient vos conseils sur la manière dont le gouvernement pourrait commencer à éliminer de tels obstacles?
Vince Hopkins : Merci, Mélanie.
Oui, il s'agit d'une question difficile. Je vois les choses sous deux angles différents. D'une part, je pense qu'il s'agit d'une collaboration publique quand nous invitons les gens à participer à la conception, à la mise en œuvre ou à la formulation. Je pense que nous pouvons les entendre décrire leur expérience et la manière dont ils comprennent les programmes et les politiques du gouvernement. Je pense aussi qu'il est possible d'apprendre des gens et d'entendre comment ils décrivent leur propre vie. Nous pouvons, en quelque sorte, en tirer des leçons. Dans mon travail, nous parlons beaucoup des services d'emplois. Il s'agit d'un terme très vague pour les personnes qui accèdent réellement aux services d'emplois. En général, ils les considèrent davantage comme des programmes concrets : la formation professionnelle, l'orientation professionnelle Même des termes qui peuvent avoir beaucoup de sens pour des personnes du milieu, un programme comme les subventions salariales où le gouvernement paie une partie du salaire horaire ou autre d'un travailleur, pourraient ne vouloir rien dire pour le public, ou semer davantage de confusion. Je pense que la collaboration publique peut nous apprendre à parler de nos activités.
Par contre, je pense qu'il y a un revers à la médaille, à savoir que les gouvernements peuvent parfois, d'après mon expérience, en particulier dans le domaine numérique, être vraiment obsédés par ce genre de choses, et se limiter à la sensibilisation, en se concentrant notamment sur des indicateurs comme le nombre de vues sur le site Web ou de courriels ouverts, ce qui fait qu'ils perdent de vue les conséquences en aval. Je me souviens que, quand je travaillais au gouvernement de la Colombie-Britannique, nous faisions un bilan de fin d'année et nous nous demandions : « Qu'avons-nous accompli cette année? » C'était en 2020, la première année de la pandémie de COVID‑19. Quelqu'un a parlé du nombre de visites sur le site Web, et je me suis dit que c'était très bien, que c'était important, mais est-ce que cela permettait d'éviter que les gens se rendent à l'hôpital? Est-ce que nous avons vacciné la population? Quelle a été l'expérience vécue de cette conséquence? Je pense qu'il est très important de mettre l'accent sur la sensibilisation et sur la réduction de ce que nous appellerions les coûts d'apprentissage pour les citoyennes et les citoyens, mais il ne faut jamais perdre de vue l'essentiel, à savoir que ces coûts ne servent qu'à verser de l'argent dans le compte bancaire et à fournir des vaccins. Je répète, il faut vraiment se concentrer sur l'essentiel, sur l'élément que nous essayons d'optimiser, d'améliorer ou de dépasser.
Mélanie Copeland : C'est une très bonne nuance que vous avez faite. Il ne s'agit pas seulement du taux d'utilisation, mais aussi du retour sur investissement pour les citoyennes et les citoyens. La prestation répond-elle à leurs besoins? Beaucoup de points intéressants.
En ce moment, je ne vois pas de nouvelles questions de la part du public, nous allons donc poursuivre avec mes questions. Jeannie, au EDSC, il y a beaucoup de travail à faire dans tout le ministère pour combler le fossé entre les politiques et la prestation de services, et je vois de plus en plus d'efforts visant un travail avec les utilisateurs et axés sur l'adoption d'une optique centrée sur la population. J'aimerais croire que des lieux comme le laboratoire constituent un très bon outil pour nous permettre de commencer à combler ce fossé, pour nous permettre de mieux répondre aux besoins des citoyennes et des citoyens. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur la manière dont votre équipe aborde les échanges directs avec les citoyennes et les citoyens et la façon dont cette approche vous aide à garder un contact plus étroit avec le public?
Jeannie Dempster : Excellente question. Merci, Mélanie.
Dans notre ministère, il y a tellement de potentiel; le laboratoire et les projets que nous réalisons ne sont qu'une goutte d'eau dans l'océan. L'un des mandats du laboratoire est de travailler à étendre et à renforcer les capacités dans l'ensemble d'ESDC afin de renforcer ses capacités. Le laboratoire vise aussi à diffuser au moyen des réseaux des leçons que nous tirons de séances comme celle d'aujourd'hui. Nous ne voulons donc pas trop nous accrocher à ces connaissances, nous voulons les partager. Comme je l'ai mentionné dans ma présentation, je voudrais vous faire part de certaines choses très étonnantes, mais aussi des choses que nous avons remarquées au sujet de certains risques et de ces défis. Pour ce qui est de joindre les personnes que nous voulons interviewer, cela a parfois été très facile, comme je l'ai mentionné au sujet de la prestation de SRG et de l'utilisation du SRG chez les aînés à faible revenu. Nous disposions d'une population et de jeux de données. Ce n'est pas toujours le cas. Ainsi, en tirant des leçons de nos projets, nous avons récemment effectué des recherches et nous sommes entrés en contact avec des organisations externes qui disposent de jeux de données et de listes de grande qualité. Nous avons dû tenir compte de certaines considérations importantes concernant la confidentialité et la sécurité des données, et de la fiabilité et de la viabilité de certaines des organisations externes que nous avons identifiées, et avec lesquelles nous avons actuellement une très bonne relation de travail. Cette dernière a également contribué à résoudre les problèmes qui ont été soulevés plus tôt par Anna et Vince, concernant le temps que nous demandons aux populations. En particulier, je pense aux personnes qui n'ont peut-être pas tout le temps du monde, soit de 60 à 90 minutes pour un entretien approfondi.
En ce qui concerne l'indemnisation, il est important de disposer de bonnes politiques et approches en la matière. Chaque ministère aura sa propre approche, et je crois aussi qu'il y a une approche générale cohérente dont nous aurons besoin au sein du gouvernement du Canada. Il s'agit d'un aspect parmi tant d'autres. Et puis, très concrètement, cet automne, l'un des projets sur lesquels nous avons travaillé avec des familles à faible revenu, ou peut-être moins aisées. Et bien, ces familles travaillent toute la journée. Nous avons donc dû nous adapter lorsque nous les avons interrogés. Nous travaillons toutes et tous en virtuel depuis le début de la pandémie. Auparavant, nous rencontrions le public en personne, et nous nous rendions à leur domicile, ce qui explique pourquoi il est si important d'avoir au moins deux personnes sur place, pour des raisons de sécurité, mais aussi pour pouvoir nous adapter au temps qui est mis à notre disposition. Par conséquent, nos chercheurs devaient parfois mener leurs entretiens à dix-huit ou dix-neuf heures. Il ne s'agit là que de quelques exemples pratiques de la manière dont nous devons nous adapter et essayer de nouvelles méthodes ou méthodes qui sont différentes.
Mélanie Copeland : Merci beaucoup, Jeannie.
Le public a entre-temps posé des questions. Fantastique.
Maintenant, Vince, revenons à vous. Les paiements de la Prestation canadienne d'urgence, ou la PCU, représentent des cas très intéressants. On pourrait dire que le gouvernement a opté pour une approche de tolérance au risque. Vous saviez très bien que certaines citoyennes et certains citoyens recevaient la PCU, mais qu'ils n'y étaient pas entièrement admissibles. Mais au bout du compte, il était essentiel que les personnes les plus vulnérables aient cette prestation; celles qui arrivaient à joindre les deux bouts et celles qui devaient vraiment compter sur cet argent. Donc, d'après votre expérience, la participation n'était certainement pas un problème. Quelles seraient les similitudes, les différences avec d'autres avantages que vous auriez observés dans vos études? Qu'est-ce qui a fait en sorte que la PCU a bien fonctionné? Quelles sont les leçons à tirer pour les autres ministères qui souhaitent verser des prestations semblables?
Vince Hopkins : Oui, je pense qu'il faudrait écrire un livre sur la PCU, parce qu'elle revient à chaque fois que nous avons ce genre de conversation Nous disons habituellement que la faible participation est un problème, mais dans ce cas-ci, la faible participation n'est probablement pas le problème. Nous pouvons même approfondir la question. Je pense que le problème consiste généralement à cibler le taux d'utilisation auprès des personnes qui en ont le plus besoin. Permettez-moi de vous donner un exemple tiré de mes propres recherches, puis je reviendrai sur la PCU.
Il y a trois ans, au début de la pandémie de COVID-19, il y a eu une augmentation massive dans le nombre de demandes d'assurance-emploi. Les gens perdaient leur emploi, n'est-ce pas? Deux millions de Canadiennes et de Canadiens se sont retrouvés sans emploi sur une période de huit semaines, le taux de chômage était de 14 %, et j'ai travaillé avec le gouvernement de la Colombie-Britannique pour mener une vaste expérience sur le terrain afin de mettre à l'essai différents messages pour voir ce qui inciterait les gens à s'inscrire aux programmes de formation provinciaux. C'est quelque chose de tout à fait logique, car nous savons que les services d'emplois fonctionnent mieux en période de récession. Je suis hors de la population active, il n'y a pas d'emploi pour moi, c'est le moment idéal pour amorcer un nouveau programme de formation pour obtenir un certificat d'hygiéniste dentaire ou un diplôme d'informaticien. Il s'agit donc d'un problème très important. Nous avons assigné au hasard des personnes à différents messages, dans le cadre d'une expérience de terrain classique comme celle dont parlait Jeannie, et lorsque nous avons examiné les résultats, nous avons constaté des effets positifs très importants. L'un des messages a vraiment surpassé les autres. C'était important, car cela signifiait que nous pouvions l'utiliser pour aider des milliers de personnes supplémentaires.
Mais une étude approfondie des données a révélé un récit beaucoup plus complexe. Ce que nous avions réellement fait, c'était d'avoir fait augmenter le taux d'utilisation des personnes titulaires d'un diplôme universitaire, et parfois c'est exactement ce que l'on cherche à faire. Dans ce cas, cependant, je pense qu'il y a un argument, compte tenu de la rareté des ressources, pour dire que faire participer des personnes titulaires de deux doctorats ou d'un autre diplôme à des formations gratuites n'est pas vraiment ce que nous voulions. Je pense donc qu'il est très, très important de tenir compte du public cible. Je retiens surtout, et je pense qu'elle s'applique à la PCU et à de nombreux programmes gouvernementaux, que nous devons construire une infrastructure pour l'expérimentation dès maintenant. Par exemple, vous devriez avoir des conversations aujourd'hui avec vos informaticiennes et vos informaticiens. Il sera trop tard pour mettre en place ce type de plateforme à l'ère de la prochaine crise. Et le type d'entretiens dont parlait Jeannie et dont j'effectue également est extrêmement précieux. Les discussions sont lentes, elles prennent beaucoup de temps, surtout si l'on veut mettre l'éthique au premier plan, et elles ne fournissent pas de preuves réellement claires de ce qui fonctionne à grande échelle. C'est important de le faire pour les grands enjeux.
Donc, dans le cas de la PCU, le gouvernement a clairement dit qu'on n'avait pas besoin de trop cibler, que tous ceux qui veulent faire une demande de la PCU allaient présenter une demande, et on s'arrangerait avec les détails plus tard. Leur plan a fonctionné, ce qui fait un bon exemple de la PCU, d'après ce que j'ai lu, car elle semble avoir sauvé l'économie. Mais je pense que la leçon à retenir, c'est que le moment est venu de créer les plateformes d'expérimentation et de collecte de données et de définir les procédures de gouvernance des données et de protection des renseignements personnels qui nous permettent de faire ce genre des expériences à haut débit et à haute fréquence que les citoyennes et les citoyens s'attendent de plus en plus de leurs gouvernements. Ce que je retiens de la PCU, c'est que nous devons améliorer la définition des publics cibles et accélérer les mises à l'essai que nous effectuons.
Mélanie Copeland : Très bien dit!
Très bien, passons à une autre question. Jeannie, cette question sera pertinente pour toi.
Quelle formation recommandez-vous pour les employés qui préparent et réalisent les consultations auprès du public?
Quelle formation pourriez-vous recommander à vos collègues fonctionnaires qui sont responsables d'entreprendre des consultations auprès du public?
Jeannie Dempster : Merci! Et c'est une très bonne question par rapport aux types de formations possibles. Il y en a plusieurs. Et ce que je dirais, c'est que ça dépend de combien de temps vous pensez que vous seriez engagé, c'est-à-dire la profondeur de vos projets. Il existe des cours qui d'un, deux jours, ou une semaine par exemple, qui sont possibles dans le domaine de "user experience", "client experience", des certificats qui sont possibles qui nous donnent des bases et des fondations de connaissances qui sont nécessaires. De plus, il y a des programmes académiques au niveau universitaire de Bac, de Maîtrise et même de haut niveau. Alors, ça depend.
Il y a une trajectoire qui va de quelques jours de cours pour obtenir un certificat, jusqu'aux diplômes et aux grades. En particulier, si vous vous intéressez à des établissements comme l'Université de l'École d'art et de design de l'Ontario (EADO), cela vous donne une excellente formation sur la pensée du design, en plus d'enseignements. Et si vous êtes dans un domaine universitaire, comme la sociologie, la psychologie sociale, vous pouvez vous intéresser à des domaines spécifiques au comportement, à la compréhension du comportement et à l'économie comportementale. Il s'agit simplement de compléter les connaissances quantitatives par des connaissances qualitatives. Je répète donc en anglais ce que j'ai dit en français, et j'espère que cela répondra à vos questions. Mais j'effectuerais quelques recherches et je les comparerais à vos besoins en matière de travail.
Mélanie Copeland : Merci beaucoup, Jeannie.
Anna, Vince, y a-t-il une formation supplémentaire qui vous vient à l'idée dont les fonctionnaires pourraient bénéficier pour se sentir à l'aise dans leurs relations avec le public? Il existe également différentes techniques. Anna, je pense à toi parce que tu as mené des entrevues directes, tout comme toi, Vince, mais tu as discuté directement avec une centaine de personnes qui ont déclaré être en situation d'itinérance. Quelles sont les compétences dont vous avez eu besoin pour vous sentir à l'aise dans ce domaine? Je suis vraiment curieuse, quelles étaient les compétences générales, comme la capacité d'écoute et l'empathie?
La parole est à vous, Anna.
Anna Kopec : Merci, Mélanie. Il s'agit d'une excellente question.
J'enseigne les méthodes de recherche qualitative à des étudiantes et des étudiants, et je commence donc toujours par leur demander de se sentir à l'aise dans des situations où ils sont mal à l'aise. Je l'ai dit dans ma présentation et je le répéterai probablement. Je pense qu'il s'agit d'une compétence importante. Je pense aussi qu'il y a beaucoup de recherches en cours et que de nombreux chercheuses et chercheurs, tout comme moi parfois, ne réfléchissent pas souvent au temps passé sur le terrain. Je pense donc que c'est quelque chose que nous devons faire plus souvent, et que je fais dans le cadre de mon travail, afin d'éclairer non seulement d'autres chercheuses et chercheurs, mais aussi d'autres personnes qui travaillent auprès des citoyennes et des citoyens. Je pense donc que nous pouvons nous inspirer des recherches antérieures qui ont été menées sur divers sujets difficiles dans différents contextes. J'ai lu beaucoup de recherches menées par des ethnographes auprès de populations difficiles à atteindre. Parfois, il s'agissait de lire les réflexions de chercheuses et chercheurs qui menaient des recherches dans des zones de conflit ou avec des populations autochtones et des populations difficiles à atteindre. Malheureusement, comme je l'ai dit, le monde universitaire tarde encore à le faire. Je pense qu'il s'agit d'un problème qui se présente également dans le milieu universitaire et que nous devons le rectifier. Il faut espérer que ces efforts permettront également de créer des partenariats avec les pouvoirs publics.
Je pense également qu'il faut beaucoup de compétences générales. Mais je pense que je me concentrerai davantage sur l'empathie. La pandémie de COVID-19 a frappé juste au moment où j'effectuais du travail sur le terrain à Toronto, et je suis donc passée à des entretiens en ligne sur Zoom lorsque c'était possible ou à des entretiens téléphoniques avec des participantes et des participants qui se trouvaient dans des refuges pendant la pandémie ou dans des hôtels d'isolement prévus pour mitiger la COVID-19. J'ai remarqué très rapidement l'importance de mon langage corporel, du contact visuel, de faire preuve d'empathie et de l'interaction face à face, tant pour moi que pour les participantes et les participants. Je pense donc qu'il est important de faire des entretiens en personne. Cela pose également de nombreux défis, tant sur le plan de l'éthique que sur celui de l'accès. Il faut également réfléchir aux gardiens de différentes populations. Les entretiens en personne prennent plus de temps, ce qui, je le sais, n'est pas toujours une bonne chose. Cependant, ce temps est nécessaire pour établir des relations, gagner la confiance des participantes et des participants et les mettre à l'aise. J'ai également fait certaines choses un peu différemment. Je n'ai pas toujours enregistré les entretiens. J'ai travaillé avec les participantes et les participants pour m'aider à rédiger les notes d'entretien. Dans ces échanges, les participantes et les participants ralentissaient et je prenais des notes en collaboration avec eux, car j'ai constaté que l'enregistrement faisait parfois obstacle à cette confiance et à cette relation. Je pourrais continuer, mais je vais m'arrêter ici. Je vous invite à me poser des questions sur lesquelles je peux revenir par la suite.
Mélanie Copeland : C'était vraiment intéressant.
Vince, avez-vous constaté des difficultés semblables liées aux mesures de lutte contre la pandémie de COVID-19 pour ce qui est d'obtenir des données pour votre recherche. Je suis curieuse de savoir s'il y a d'autres idées créatives que vous pourriez ajouter aux éléments qu'Anne a présentés.
Vince Hopkins : Oui! Quand je faisais de la recherche sur les utilisatrices et les utilisateurs au sein du gouvernement avant la pandémie, je devais toujours faire une présentation sur l'utilisation d'Internet pour faire des entretiens. Je pense qu'il y avait une réelle préférence pour les entretiens en personne, c'est-à-dire d'envoyer d'une équipe de fonctionnaires par avion dans une communauté rurale ou éloignée et de réaliser les entretiens face à face. Je pense que l'évolution vers tout réaliser en ligne a vraiment aidé. En revanche, je pense qu'il y a une leçon plus large à en tirer, à savoir que je pense que nous pouvons commencer à nous éloigner de cette situation. Les participantes et les participants à la conférence d'aujourd'hui connaissent peut-être l'expression « en cascade » ou « agile ». Il s'agit de l'idée selon laquelle nous faisons beaucoup de promotion en vue du lancement d'un produit important. Ensuite, c'est comme si nous sortions d'une cascade, c'est à peu près aussi terrifiant. Il me semble que nous faisons de la recherche de la même manière. Nous nous disons que nous ferons des entretiens dans deux mois, alors utilisons ces deux mois pour présenter le projet à un comité d'éthique, en faisant appel à des chercheuses et chercheurs universitaires, à faire circuler des questions et à trouver le bon modèle d'indemnisation. Je pense que nous pouvons simplement passer à une approche de recherche beaucoup plus continue, où nous discutons avec une personne par semaine. Il s'agit d'un changement complet à notre méthode de recherche sur les utilisatrices et les utilisateurs et la conception de politiques publiques, et je pense que c'est un tournant qui s'est avéré extrêmement positif. Ainsi, l'évolution vers des entretiens en ligne au moyen de Zoom ouvre également la voie à un modèle de collaboration avec le public qui réduit la quantité de travail, les coûts et les risques par rapport à notre façon de faire des choses. Chaque semaine, nous parlons à quelqu'un, et nous l'intégrons dans notre façon de procéder. Et puis, à la fin de l'année, nous avons réalisé des dizaines d'entretiens. Nous pouvons également compléter ce modèle par une approche en cascade, qui demeure importante. Cependant, Anna, je pense que votre remarque sur l'évolution vers Zoom et les entretiens en ligne ouvre de nombreuses possibilités pour le gouvernement.
Mélanie Copeland : Merci beaucoup, Vince.
Jeannie, je pense que vous vouliez ajouter quelque chose à la conversation? Allez-y.
Jeannie Dempster : Tout d'abord, j'aimerais compléter les propos d'Anna et de Vince et signaler que je suis tout à fait d'accord avec eux. L'empathie et les autres... Bon, je vais utiliser le terme « compétences générales », mais je ne l'aime pas. Je pense qu'elles sont tellement importantes. Le mot « générales » ne les représente pas suffisamment. C'est quelque chose qui me dérange personnellement, c'est tout. Mais l'empathie, qui va bien au-delà de ses compétences, de ses qualifications, de sa formation de base, est un élément essentiel de ce que nous faisons au Ministère, et je sais que c'est aussi le cas dans d'autres ministères. De toute façon, même si vous êtes dans un ministère davantage axé sur l'économie, si vous travaillez avec l'industrie, avec le ministère de la Défense nationale ou d'autres ministères, il faut avoir ces compétences. Si on y regarde de plus près, et cela nous ramène peut-être à la question de la formation, des négociations dans le domaine de la formation, de la diplomatie, de la résolution de conflits, il y a tellement de choses là-dedans. Et je suis sûre que cela fait partie de beaucoup de programmes qui sont également enseignés à l'école et qui sont intégrés à votre programme.
J'aimerais aussi suggérer quelque chose que je n'ai pas entendu, et c'est peut-être une question que certains se posent quant à la façon de joindre certaines de ces personnes. Nous nous intéressons également aux organisations communautaires. Où se trouvent les relations existantes déjà? Qui y a déjà établi une relation de confiance à cet égard? Parce que la confiance est un élément important de ce type de mobilisation et de recherche. Et nous savons, nous avons vu qu'il y a aussi des recherches sur l'érosion de la confiance envers le gouvernement. Et donc, tout cela, tellement de choses que nous devons avoir à l'esprit pour nos activités. Et l'autre grand élément que je veux amplifier, et que j'ai mentionné un peu plus tôt, c'est le concept de la vie privée, qui est d'une importance capitale. Nous disposons de nos processus et de nos règles en matière de protection de la vie privée à EDSC, et je sais que d'autres ministères en ont aussi. Nous travaillons en étroite collaboration avec nos collègues chargés de la protection de la vie privée dans le cadre de chacun de nos projets. Il y a quelques années, nous avons mis au point ce que nous appelons un protocole de protection des renseignements personnels. Ensuite, on ajoute à cela pour... chaque projet a son propre élément, un ajout lié à ce groupe particulier de personnes avec lesquelles nous pourrions vouloir travailler. Je tenais donc à amplifier et à ajouter à ce qui vient d'être dit. Alors, merci.
Mélanie Copeland : Merci beaucoup, Jeannie, et nous allons rester avec vous encore un peu, car j'ai une question à vous poser.
Anna et Vince nous ont parlé de l'idée d'une consultation continue et d'une conception conjointe avec les citoyennes et les citoyens ou les communautés touchés par nos programmes et nos politiques. D'après vous, quels sont les défis auxquels sont confrontés les pouvoirs publics en matière de mobilisation continue ou de conception conjointe par rapport à une consultation ponctuelle? Qu'est-ce qui permet de relever les défis pour que la conversation se poursuive?
Jeannie Dempster : Je dirais qu'il y a deux ou trois grandes choses. Tout d'abord, le temps que l'on doit mettre de côté. En ce qui concerne EDSC, nous avons mené à bien des projets que nous aurions aimé poursuivre, mais de nouveaux projets sont apparus et nous avons changé d'orientation. Nous sommes dans le processus d'entamer des discussions à ce sujet. Nous avons des partenaires de projet avec lesquels nous avons travaillé dans le passé et qui sont revenus vers nous. Nous comptons donc un peu sur nos collègues pour qu'ils nous fassent part de leurs commentaires, de leurs travaux et de mobilisations. Il s'agit simplement de ressources et de capacités. J'aimerais que nous puissions en faire plus dans le laboratoire, mais cela revient un peu à renforcer les capacités des équipes. Donc, si vous pouvez intégrer le travail, alors vous intégrerez ces points de vue au sein des équipes opérationnelles, parce que nous ne pouvons tout simplement pas le faire. Nous ne pouvons pas tout faire. Aucune équipe d'innovation ne peut ou ne devrait le faire. Il s'agit vraiment de diffuser des leçons et d'aider à renforcer cette capacité.
L'autre chose que je dirais au sujet de la mobilisation continue, c'est qu'il faut avoir des gens qui sont prêts à y participer. Il est agréable pour nous d'arriver avec des fleurs et de dire, nous vous aimons vraiment et nous voulons vraiment travailler avec vous, souhaitez-vous continuer à travailler avec nous? Mais le sentiment n'est peut-être pas toujours réciproque. Il faut donc veiller à choisir et à trouver des partenaires, et à instaurer la confiance. Je pense que ce sont les éléments les plus importants pour moi. Je sais qu'il y en a d'autres, mais je ne veux pas prendre trop de temps.
Mélanie Copeland : Merci, Jeannie.
Passons à un court récit pour celles et ceux qui sont en ligne. En Estonie, lorsqu'un enfant naît, les parents reçoivent un merveilleux petit message texte qui dit : « Félicitations pour la naissance de votre enfant. Voici les prestations auxquelles vous avez droit et qui seront déposées directement dans votre compte bancaire. Je vous souhaite une bonne journée. J'espère que vous aurez l'occasion de dormir un peu. » Anna, vous avez donné des exemples de politiques qui ne sont pas accessibles, et je me souviens d'en avoir longuement discuté avec mon équipe : et si nous nous contentions d'une inscription automatique? Je pense qu'il y a des défis à relever, en plus du droit personnel de choisir une prestation ou d'accepter une prestation. Alors, comment le gouvernement peut-il améliorer ses pratiques? Tout d'abord en veillant à ce que les politiques soient accessibles et à ce que nous soyons bien placés pour faciliter l'inscription. Comment simplifier l'inscription, surtout si l'on considère que l'on devrait pouvoir décider de s'inscrire ou non?
Anna Kopec : Merci. C'est une excellente question, et je vous remercie pour ces précisions.
Mélanie Copeland : (rires)
Anna Kopec : Il est très important d'ajouter ici une anecdote, car j'ai beaucoup parlé avec des personnes qui ont accès à de multiples politiques différentes, ce qui explique pourquoi l'itinérance est un domaine politique si important. Il interagit avec un grand nombre de domaines politiques différents. Une bonne partie des discussions que j'ai eues avec des gens, évidemment dans le contexte de Toronto, portait sur le programme Ontario au travail, qui est le programme d'aide sociale de la province, ainsi que sur le soutien aux personnes handicapées, le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées, dans le contexte ontarien. De plus, les gens ont parlé de devoir se rendre à un bureau d'Ontario au travail, alors qu'à Melbourne, il y avait des agents d'aide sociale qui se rendaient dans des centres d'hébergement d'urgence et aidaient les gens à remplir leurs demandes à l'endroit où ils se trouvaient déjà et dans lequel ils étaient plus à l'aise. Les gens m'ont dit à quel point c'était important, qu'ils n'avaient pas besoin de se déplacer, alors qu'à Toronto, des gens m'ont expliqué à quel point il est désarmant de s'asseoir en face de quelqu'un, avec un vitrage anti-balles entre eux. Même si, bien sûr, beaucoup de choses peuvent se faire en ligne pour des raisons d'accessibilité, je pense que les environnements dans lesquels nous demandons aux gens de se retrouver, ici, par rapport à l'endroit où ils iraient par obligation. Si quelqu'un se trouve dans un refuge ou un centre d'accueil, qu'il utilise un ordinateur pour présenter une demande en vue d'un programme et qu'il n'est pas certain de la façon de procéder, c'est le personnel de première ligne des refuges qui est déjà surchargé qui est appelé à mettre la main à la pâte. Il faut donc réfléchir à certaines de ces préoccupations en matière d'accessibilité.
De plus, même moi, j'ai parlé à des gens qui demandaient des prestations du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées, ou POSPH, c'est-à-dire l'aide sociale pour personnes handicapées, et les gens m'ont dit qu'ils devaient consulter de nombreux médecins pour justifier une maladie ou obtenir toute la paperasse. Quand les personnes en situation d'itinérance ne se promènent pas avec leur portefeuille de la santé et qu'elles doivent recueillir tous ces documents, il s'agit d'un énorme fardeau administratif pour tout le monde, surtout pour une personne qui vit dans un logement précaire. Je pense donc que l'intégration est essentielle, surtout dans le contexte de l'itinérance. En particulier, à Melbourne, il y avait un centre où il n'y avait pas seulement des logements d'urgence, mais aussi un dentiste, un podiatre, un nutritionniste, un psychologue, puis des travailleurs de l'aide sociale, au même endroit. Il s'agit d'un excellent exemple d'intégration, dont nous parlons beaucoup, mais dont nous voyons rarement de cas concrets, surtout en ce qui concerne l'itinérance, en pensant aux effets sur l'accessibilité et la visibilité. Je m'arrête ici.
Mélanie Copeland : Wow, il y a beaucoup de choses à analyser ici, c'est certain, et j'adore le fait que vous étudiez ce domaine de travail, ce qui est vraiment bénéfique pour nous, et la façon dont nous abordons notre travail, et dont nous apprenons de vous.
En parlant de fardeau, Vince, vous avez beaucoup parlé du coût de l'administration publique, de la façon dont le fardeau est transféré, parfois de façon inadéquate ou inéquitable, je ne sais pas trop quel mot utiliser, de façon inégale pour la citoyenne ou le citoyen. Que pensez-vous de l'idée de rendre les politiques plus accessibles, plus faciles ou moins bureaucratiques pour permettre aux citoyennes et aux citoyens d'obtenir ses prestations?
Vince Hopkins : Merci, j'adore l'exemple que vous avez donné.
Donc, au Canada, ce sont les personnes non logées qui paient les coûts de l'administration publique. En Australie, il s'agit du gouvernement du prend en charge ces coûts. C'est un exemple très clair de quelqu'un qui doit payer le coût. Il s'agit en quelque sorte d'un choix fondé sur des valeurs. Je pense que la chose qui rend les choses plus compliquées dans notre contexte que peut-être celui en Estonie, c'est que nous sommes une fédération. Donc, évidemment, dans les États fédéraux, ce genre de partage de pouvoir particulier vient avec un partage de données difficile. Donc, des principes comme la politique « Une fois suffit », où les gens disent au gouvernement, voici mon nom, voici mon anniversaire, voici mes renseignements, ma déclaration de revenus, vous faites le tri de tout le reste, c'est difficile à faire dans un État fédéral parce que les gens finissent par devoir répéter leurs informations à leur municipalité, à la province ou au gouvernement fédéral. J'aimerais quand même répondre en suggérant d'utiliser les données que nous recueillons déjà. Nous recueillons des tonnes de données et, d'après mon expérience, le couplage des données est en quelque sorte un risque imaginaire. La plupart du temps, il est possible de coupler les données. C'est une question de vision, de volonté, de demandes, de cajolerie et de tout ce que vous pouvez faire pour que les liens entre les données se réalisent. Cette approche représente un moyen très efficace de simplifier la vie des citoyennes et des citoyens et de réduire les coûts qui leur sont transmis.
Cela n'a rien à voir avec la distinction de la conception du programme ou même de la politique dont parlait Anna, où, de manière générale, quelqu'un a fait un choix pour dire « ce sont nos travailleurs sociaux, ce sont nos fonctionnaires qui vont aller chercher les gens de façon proactive ». Il y a donc une sorte de choix à faire. Voulons-nous réduire les coûts en amont, auquel cas vous allez faire appel à des décideurs de haut niveau, à de hauts dirigeants ou à des personnes en aval. Est-ce que cela fait partie de l'ensemble de caractéristiques que vous concevez pour un programme, auquel cas vous pourriez peut-être vous servir des liens de données existants. Je dirais que ce sont là mes deux solutions à ce problème.
Mélanie Copeland : Merci beaucoup, Vince.
Jeannie, revenons à vous. Nous avons une autre question qui a été posée par quelqu'un du public : Vous avez tous discuté de la collaboration publique dans le contexte des programmes et des prestations. Pourriez-vous nous parler des principes et des idées, ou de la manière dont les principes et les idées pourraient être différents dans le cas d'autres formes de services gouvernementaux ou de collaboration gouvernementale? Y a-t-il des différences importantes?
Jeannie Dempster : Je pense que la réponse brève, c'est oui. Vous avez pu constater que les antécédents des participantes et des participants sont tous très fortement liés aux politiques et aux programmes socioéconomiques. Nous n'avons pas beaucoup parlé de la prestation de services. Les ministères fournissent des services dans toutes sortes de domaines différents. Je pense à deux d'entre eux en particulier. Je dirais donc, comme beaucoup d'entre vous le savent déjà, qu'il est possible que vous participiez à ce projet en venant du laboratoire d'un autre ministère. De nombreux laboratoires différents ont vu le jour au cours des dernières années. Je pense qu'il y en a probablement certains que je ne connais même pas et que j'aimerais apprendre à connaître. Par exemple, l'une des choses qui m'a vraiment frappée jusqu'à présent, c'est qu'il n'y a pas deux laboratoires qui fonctionnent de la même façon. Et ils sont vraiment concentrés sur le mandat. Ainsi, lorsque je parle d'approches centrées sur l'humain, je parle littéralement du fait que nous fournissons des services à des personnes vivant au Canada, et tout le travail, toutes les expériences et tous les exemples que je vous montre et dont je vous parle sont basés sur cette réalité. De nombreux ministères sont davantage axés sur les services. Mes collègues d'ESDC qui travaillent du côté de Service Canada se concentrent particulièrement sur l'expérience des services de première ligne. Je sais qu'IRCC dispose d'un laboratoire et qu'une grande partie de ses offres de services ont toujours été axées sur l'accessibilité aux services dont nous avons entendu parler aujourd'hui.
En fait, j'ai plutôt une question à poser et j'aimerais en savoir plus, car lorsque nous parlons de compétences centrées sur l'humain, les compétences que nous utilisons, la pensée conceptuelle est la plus importante. Si vous consultez l'EADO pour obtenir plus d'information sur ces programmes, vous pouvez obtenir différents diplômes à des niveaux différents. Je pense qu'une bonne partie des compétences qui sont axées sur l'expérience client, l'expérience utilisateur, me font réfléchir à la marche à suivre. J'imagine que j'entends mes collègues d'ECCC ou de RNCan se demander ce qu'il faut faire lorsque l'utilisateur final n'est pas nécessairement un être humain. S'agit-il d'une plante, d'un animal ou d'un rocher? Je suis sûre que vous avez des exemples et j'aimerais les entendre. Je pense que les principes et les idées resteront les mêmes et qu'il s'agira d'apporter ces compétences qualitatives qui peuvent aider à compléter ce que vous avez déjà dans votre recherche quantitative et statistique de base. Il s'agit de maximiser l'accès aux différents types de recherche qui peuvent être disponibles et qui vous aideront, dans votre ministère, à élaborer les politiques optimales, à perfectionner vos programmes et à améliorer la prestation de vos services. Il s'agit d'avoir cet état d'esprit. Ces compétences et ces approches peuvent changer d'un ministère à l'autre et au fil du temps. Et ne me parlez pas de systèmes et de conception de systèmes, car je pense que c'est le prochain grand domaine sur lequel le gouvernement devrait s'orienter, selon moi. Mais il s'agit là d'un sujet pour une autre séance, je pense.
Merci, Mélanie.
Mélanie Copeland : Merci, Jeannie, et voilà mon chat, qui arrive à point nommé.
Oui, tout dépend de ce que vous mettez au centre de vos décisions, n'est-ce pas? J'ai entendu Anna parler de placer l'être humain au centre de toutes les décisions, et de l'importance de travailler avec l'utilisateur, de schématiser son expérience et de l'écouter directement, d'établir cette relation et cette empathie afin de comprendre comment il se sent, de connaître les circonstances de l'environnement, etc.
Nous avons une question très amusante dans le clavardage. L'ARC a donc publié des mèmes amusants le jour de la Saint-Valentin, lesquels ont suscité beaucoup d'attention. Quelles sont les solutions numériques créatives de ce type – le fait d'avoir un compte TikTok – que nous devons exploiter en tant que service public? Anna, vous avez parlé d'inviter votre interlocuteur à rédiger vos notes avec vous. Je pense qu'il s'agit là d'un exemple de comment faire participer les gens au processus et de les aider à échanger avec vous dans le but de réfléchir comment ces services pourraient leur être bénéfiques. Avez-vous envisagé d'autres moyens d'atteindre en particulier ces populations vulnérables? Ils ne sont pas nécessairement sur support numérique, nous devons parfois nous rendre sur place, par exemple.
Anna Kopec : Oui, je pense qu'il y a beaucoup de choses à faire; des personnes beaucoup plus créatives que moi sauraient répondre à cette question mieux que moi. Je pense qu'il est important d'accorder de l'attention à ces différents lieux. Je pense qu'il y a de nombreuses hypothèses qui sont faites, à savoir que les personnes en situation d'itinérance n'ont pas accès à certaines choses alors qu'il y en a beaucoup qui ont accès au téléphone, mais pas nécessairement à une bonne connexion Internet, alors peut-être qu'à la source, dans les centres, il y a une sorte de plateforme où les gens qui viennent pour obtenir des services y ont également accès. Je pense toujours à ces éléments en relation avec les élections parce que mes recherches précédentes portaient sur le vote, et beaucoup de personnes en situation d'itinérance ne savent pas qu'elles peuvent voter et ne connaissent pas la marche à suivre. Beaucoup de fournisseurs de services m'ont dit qu'ils recevaient d'énormes dépliants d'Élections Canada. Donc, peut-être même avant d'être un utilisateur du service, il serait bon d'avoir différentes plateformes pour même communiquer avec les travailleurs de première ligne afin de faciliter le traitement de l'information et peut-être de réduire le fardeau administratif. Cependant, lorsque je pense à divers moyens en ligne, je pense à ce que nous pourrions faire pendant les élections pour nous assurer que les personnes qui vivent dans des conditions précaires connaissent leur droit fondamental de vote, que beaucoup de gens ignorent, comme je l'ai constaté dans mes recherches. Mais oui, je pense que je vais laisser mes deux camarades répondre.
Mélanie Copeland : C'était une très bonne réponse, Anna, bravo.
Vince, Jeannie, avez-vous des observations, des suggestions sur la manière dont le gouvernement pourrait faire preuve de créativité ou utiliser un langage simple, comment nous pourrions communiquer? Notamment, on pourrait dire aux adolescents, hé toi, tu as droit à ces prestations. Avez-vous des suggestions sur la manière d'améliorer nos communications?
Jeannie Dempster : Oui.
Mélanie Copeland : À vous, Jeannie.
Jeannie Dempster : Permettez-moi d'intervenir. J'ai vu ces mèmes et je les ai aimés. Donc, si quelqu'un de l'ARC est présent, bravo pour ce travail. Cela dit, pour tous les autres, l'ARC est dans le coup depuis plus longtemps que les autres. Je pense même que l'ARC a mis sur pied son laboratoire avant le lancement du laboratoire de l'innovation d'ESDC. Ils ont travaillé dans ce domaine, et ont mis à l'essai différentes choses. L'utilisation de l'humour, comme beaucoup d'entre vous le savent probablement au sein du gouvernement, est risquée, car si le message ne passe pas, nous en entendons parler très rapidement. Pour ce qui est des approbations pour ce genre de choses, il y a beaucoup d'aversion pour le risque associé à des projets de nature plus créative. Il est plus sûr de faire choisir les approches qui ont fait leurs preuves. L'ARC doit s'assurer que les gens paient leurs impôts, alors elle doit avoir des réticences à cette approche qui est pas testée et inconnue. C'est son mandat. L'organisme se concentre donc sur cet objectif. Je pense que les approches dépendent vraiment de l'objectif de votre ministère. Nous le savons depuis un certain temps, mais j'ai vu des choses qui ne se sont pas déroulées aussi bien, et c'est la raison pour laquelle il est si important d'avoir un processus d'examen interne. C'est pourquoi je pense qu'il est très important qu'EDSC se penche sur cette question. Nous savons que d'autres ministères se sont dotés de ces outils. Vous pouvez donc penser qu'il s'agit de quelque chose de vraiment génial, mais il est toujours mieux de demander à quelqu'un d'autre de le mettre à l'essai. Nous avons même consulté d'autres ministères lorsque nous étions à la mi-parcours de certains de nos grands projets. Nous en avons présenté un à Santé Canada, il y a quelques années, et nous lui avons demandé de nous faire part de ses commentaires et de nos suggestions. Je pense que j'aimerais soulever le fait qu'il est important de mettre à l'essai certains concepts en interne et de diffuser les leçons apprises entre nous avant de les rendre publiques. Merci.
Mélanie Copeland : Oui, vas-y, Vince. Allez-y.
Vince Hopkins : Je veux simplement faire un suivi très rapide. Oui, je veux dire, j'adore ça, et je pense que l'ARC est extrêmement importante étant donné le nombre de programmes qui passent par les crédits d'impôt. Donc, l'ARC est une sorte de.... je ne veux pas dire l'éléphant dans la pièce, mais, peu importe, les éléphants sont impressionnants, mais l'ARC est un acteur important dans notre domaine. Je pense également que lorsque nous élaborons des stratégies intelligentes de marketing viral, nous devons les mettre à l'essai à l'interne, comme l'a dit Jeannie. Mais je pense que nous devrions les mettre à l'essai à l'externe également. Nous devons apprendre si ces mesures fonctionnent, si elles augmentent réellement le nombre de déclarations de revenus parmi les personnes dont les revenus sont inférieurs à un certain seuil, ou si elles augmentent le nombre de déclarations de revenus parmi les nouveaux arrivants au Canada. Je pense à Spotify Wrapped, un service génial qui est devenu une sorte de campagne de marketing viral classique. Mais Spotify effectue également des tests A/B, chaque jour, sur des dizaines ou des centaines de fonctionnalités. Je ne pense donc pas qu'il faille se contenter de porter les parties les plus visibles et les plus médiatisées des produits technologiques numériques. Nous devons également nous atteler à la tâche quotidienne qui consiste à mettre à l'essai différentes fonctionnalités et à voir ce qui fonctionne; à augmenter le nombre de déclarations fiscales, de demandes, d'inscriptions, de dépôts bancaires, etc. Donc, des essais internes? Oui. Des essais externes? J'adore.
Mélanie Copeland : Quel bel exemple d'itération fréquente! Fantastique.
J'allais dire que je ne sais pas comment mon mari se serait senti si je lui avais offert une carte de Saint-Valentin qui disait : « Je veux avoir des personnes à charge admissibles avec toi ». Mais, quoi qu'il en soit, c'est peut-être ce qui l'intéresse.
D'accord, passons à la question sept. Vince, Anna, d'après vos consultations de recherche, dans quelle mesure, le cas échéant, la méfiance à l'égard du gouvernement est-elle un facteur dans l'utilisation des services ou des programmes? Vince, vous venez de parler de Spotify. En tant que citoyenne, je n'ai aucun problème à fournir tous mes renseignements personnels si cela me permet d'obtenir les services que je souhaite. Ce n'est pas la même chose que de s'inscrire à un programme d'aide gouvernementale. J'aimerais donc commencer par Vince, puis à Anna.
Vince Hopkins : Certainement. Les gouvernements exigent quelques compromis, en particulier sur les questions vraiment importantes. Plus nous parlons d'un sujet, plus nous risquons d'attirer l'attention des médias. Plus le risque d'attention médiatique est élevé, plus il est probable qu'il affecte la confiance. Les dossiers pourraient devenir politisés ou diviser la société. Pensez aux vaccins, à la PCU, et dans l'Ouest du Canada, aux sites d'injection sécuritaires. Je pense donc qu'il y a en fait ce que nous appellerions une relation endogène... il y a cette sorte de relation bizarre et complexe. À mesure que nous améliorons l'utilisation au moyen de la sensibilisation, nous risquons de détourner le public du projet en tant que tel. Aux États-Unis, on a pu constater que les républicains étaient moins enclins à s'inscrire à l'Obamacare qu'à l'Affordable Care for America Insurance Plan. Ainsi, quand les gouvernements rendent quelque chose très important, cela peut en fait détourner les gens. Pourtant, nous avons besoin d'atteindre une certaine notoriété pour accroître la sensibilisation. Il s'agit donc d'un véritable compromis pour les gouvernements. Ils doivent faire preuve d'une grande prudence entre la couverture médiatique et la sensibilisation du grand public.
Mélanie Copeland : Merci beaucoup.
Anna, c'est à votre tour.
Anna Kopec : Oui, j'adore cette question et je pense qu'elle est importante, surtout en ce qui concerne l'itinérance. Cette question m'est souvent posée par les politologues, notamment lorsqu'il s'agit de réfléchir à la confiance envers le gouvernement. Et je pense qu'il y a beaucoup plus de nuances. Il s'agit de personnes qui ont été littéralement abandonnées par de nombreux services gouvernementaux, et ce, à maintes reprises. Donc, oui, la confiance est un facteur. Mais si vous êtes déjà dans cette situation, que vous allez dans un refuge et que vous vous heurtez à encore plus d'obstacles, que vous essayez de demander des prestations et que vous rencontrez d'autres obstacles, et que soit dit en passant, il n'y a pas de clinique qui puisse répondre à vos besoins, vous vous trouvez dans ce cycle vicieux où toutes ces politiques et tous ces services créent encore plus de méfiance et de désengagement d'une certaine façon, et peut-être que dans tout ça, vous aviez déjà des doutes envers le gouvernement. En outre, je pense qu'il est important de réfléchir au fait qu'il peut y avoir de la méfiance, mais que la méfiance n'est pas toujours synonyme de désengagement. Ainsi, bien que ces personnes en marge de la société soient repoussées à l'écart du gouvernement, elles tentent toujours d'apporter des changements de différentes façons et de s'exprimer. Il s'agit simplement de savoir si le gouvernement les entend et s'il dispose de lieux pour leur permettre de s'exprimer. Je pense donc qu'il s'agit d'un cycle en ce qui concerne la confiance et la manière dont nous concevons les politiques. Je pense que je le dirai toujours : la manière dont nous concevons les politiques constitue un élément clé de cette relation. Le gouvernement a donc, je pense, beaucoup de pouvoir en la matière, en particulier lorsqu'il s'agit de populations marginalisées.
Mélanie Copeland : Oui, revenons à la façon dont nous concevons les politiques. Vos propos me rappellent Singapour, où l'on élabore les politiques au grand jour avec les citoyennes et les citoyens; il y a donc là quelque chose à envisager pour nos auditrices et nos auditeurs en ligne.
Passons donc à notre dernière question avant de conclure. Je m'adresserai à vous toutes et tous, en commençant par toi, Jeannie. Voici une question pour le groupe d'experts : Quels pourraient être les pièges et les défis à relever pour garantir que nous disposions de paramètres de consultation plus larges et plus inclusifs dans le cadre de projets liés à la technologie, tels que la mise en œuvre de nouvelles technologies et la gestion de l'identité? Comment pouvons-nous faire en sorte que nous atteignons les populations marginalisées afin qu'elles ne soient pas seulement incluses dans la recherche, mais qu'elles soient incluses dans toutes les étapes du projet? Il s'agit donc d'une question tendancieuse, d'une curiosité pour les projets liés à la technologie, comme l'identité technologique. Comment s'assurer que les populations marginalisées sont bien incluses dans ces conversations et dans la conception? Jeannie, veux-tu tenter de répondre?
Jeannie Dempster :Certainement.
Mélanie Copeland : La parole est à vous.
Jeannie Dempster : Je vais choisir une seule chose et je laisserai Vince et Anna aborder d'autres points, car il y a une chose que je voudrais dire et dont je n'ai pas encore abordé, et il s'agit de l'inclusion. Je dirais qu'il ne s'agit pas seulement de l'inclusion des utilisateurs finaux, mais aussi de celle des personnes qui travaillent sur les projets. Même si vous effectuez des consultations plus traditionnelles, qui constituent vos équipes et comment ces dernières sont-elles représentées? C'est un sujet sur lequel nous travaillons avec acharnement au sein du gouvernement, et je pense que nous devons continuer d'en faire plus dans ce domaine. C'est un élément dont je suis très consciente et que j'ai essayé de poursuivre, en constituant des équipes, notre équipe du laboratoire, en recrutant une brochette de personnes aux expériences, formations et perspectives variées. Quand vous concevez des projets qui vont rejoindre des populations particulières, ces populations sont peut-être marginalisées, comment pouvez-vous faire en sorte que les personnes qui conçoivent les projets représentent cette représentation? Je pense que c'est quelque chose dont nous devons toutes et tous tenir compte au gouvernement, peu importe le ministère au sein duquel nous travaillons.
Mélanie Copeland : Merci d'avoir ajouté ces points, Jeannie. Il s'agit d'un message puissant.
Vince, Anna. J'aimerais savoir ce que vous avez à dire. Faites-nous part de vos dernières réflexions.
Vince Hopkins : Très rapidement, je dirais qu'il n'existe pas de cas limite. Vous pouvez concevoir des politiques à partir de cas limites vers l'intérieur, et les connaissances que vous tirez de ce que nous considérons comme des cas limites ou des cas particuliers augmenteront probablement l'accessibilité globale du programme que vous concevez. Je suggérerais donc que nous devons modifier notre façon de penser et modifier nos valeurs. Au lieu de concevoir des politiques qui s'appliquent à la majorité des utilisateurs, concevez-en à l'intention de ce vous pourriez considérer comme une petite minorité d'utilisateurs. Et je pense que de cette façon nous pouvons parvenir à en tirer de nombreux avantages pour tout le monde.
Mélanie Copeland : Vous avez bien raison.
Anna, le dernier mot est à vous.
Anna Kopec : Merci. J'ai hoché généreusement de la tête, car je suis d'accord avec que vous avez dit, mais je me rends compte que je suis sur vidéo et que je ne devrais peut-être pas acquiescer de la sorte.
Mais oui, je suis d'accord avec ce qui a déjà été dit. Je pense qu'il s'agit d'une excellente idée d'inclure les personnes qui ont vécu diverses expériences dès le tout début d'un projet en plus de mettre l'accent, dans la conception, sur les personnes marginalisées. De plus, pour réfléchir un peu plus à la question des groupes marginalisés, comme Jeannie l'a dit plus tôt, on dispose aussi de réseaux qui sont déjà établis. Il existe des communautés dans lesquelles nous pouvons puiser. Il existe différents réseaux. Il y a des gens qui font ce travail au quotidien. Par conséquent, communiquer avec ces personnes et leur parler des projets et les inclure dans le travail que nous effectuons, mais aussi commencer par là, en partant du sol et en réfléchissant à ce que cela signifierait pour elles. En outre, il faut s'assurer que vous demandez aux diverses populations de faire quelque chose qui est également nécessaire de leur point de vue, n'est-ce pas? Ainsi, au lieu de leur arriver en disant « Bonjour, je veux faire ce projet », il faut peut-être se demander à ces personnes ce dont elles ont réellement besoin, puis concevoir les éléments à partir de là.
Mélanie Copeland : Merci beaucoup, Anna.
Voilà qui conclut la séance d'aujourd'hui. Au nom de l'École, je voudrais remercier de tout cœur nos conférencières et conférenciers d'aujourd'hui et tous les participantes et participants, partout au pays, de votre présence. Vos commentaires nous sont précieux. Je vous encourage à remplir l'évaluation sur la séance d'aujourd'hui qui vous sera envoyée par courriel dans les prochains jours. L'École propose d'autres activités. Je vous encourage à visiter notre site Web pour vous tenir au fait et vous inscrire à toutes les futures possibilités de formation. Ne manquez pas la suite de la série Le gouvernement de l'avenir, qui sera de retour cet hiver.
Merci beaucoup. Prenez soin de vous.
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